Platon comme porte-parole de la stratégie de changement

L’allégorie de la caverne platonicienne pourrait devenir un classique de la conduite du changement, après avoir été un classique de la philosophie.

Et si avant de cadrer la stratégie de transformation d’une organisation nous rouvrions un classique de la philosophie ? En effet, les classiques nous montrent parfois combien ils sont actuels. Prenons l’exemple de Platon, et de l’allégorie de la caverne. Le message du philosophe s’applique parfaitement à la conduite du changement : ne pas considérer la difficulté de changer constitue un magnifique échec du changement.

Allégorie de la Caverne - Platon - Conduite du changement

L'allégorie de la caverne ou la difficulté de vivre le changement

Rappelons rapidement la métaphore : des hommes sont enfermés dans une caverne, depuis laquelle ils ne voient qu’une lumière artificielle. Cette lumière, un feu allumé, projette sur les murs des ombres. Si on oblige l’un d’entre eux à quitter cette caverne, il sera d’abord ébloui par la lumière du jour qu’il ne connait pas et voudra certainement revenir à sa situation initiale – son ancien référentiel. S’il persiste et qu’il accepte ce changement, il se rendra compte de la réalité et de sa condition antérieure. Cependant il aura beaucoup de mal à se faire accepter auprès de ses anciens semblables, car ils refuseront de croire en ce changement et en une réalité alternative. Le message qui nous intéressera ici, est celui de la difficulté à épouser un changement brutal et de le promouvoir auprès de ses semblables.

Imaginez transformer une entreprise juste en partageant aux collaborateurs le projet futur, sans aucune concertation ni aucun accompagnement. Il y a de fortes chances que ce projet de transformation, au mieux se passe dans la douleur, au pire échoue. Ce que cette métaphore nous apprend, c’est que le changement est une problématique fondamentale et critique. L’exposé d’un plan peut être compris et interprété d’une multitude de façon, car il s’adresse ou concerne souvent un grand nombre de collaborateurs – qui ont tous une identité, une culture, et auront donc une lecture différente.

On en vient à la dualité de la portée du message délivré par le leader du changement. Est-il compris universellement ou relativement ? Le succès d’une conduite du changement, c’est de faire en sorte que le message véhiculé soit le plus universel possible, aussi bien dans sa compréhension que dans son acceptation.

La nécessité de co-construire le changement

L’écoute, l’analyse des freins, la cartographie des groupes sociaux sont des éléments essentiels de la conduite du changement. Car pour atteindre son succès le changement doit être légitime, utile et accepté par ses destinataires. C’est pourquoi lorsque l’on initie une démarche de changement, il est primordial de concerter les parties prenantes, de bien comprendre leurs besoins, mais aussi leurs craintes.

L’analyse des enjeux des parties prenantes est un point essentiel. Il est même à la base des démarches de responsabilité des entreprises. L’objectif est simple, transformer l’organisation en s’assurant de l’adhésion du plus grand nombre.

Ce recensement des attentes peut se faire au moyen d’une matrice de matérialité, qui regroupe :
– les enjeux des parties prenantes, et les enjeux du plan de transformation,
– les priorités des deux parties,
– les moyens de communication.

Co-construire le changement

De plus, pour conduire ce changement la certification IMCM®2 a bien mis en avant la notion de concertation, notamment au travers de l’outil „PARLER“ :
– P : proposer un programme de travail
– A : obtenir l’accord des parties prenantes
– R : réaliser ou adapter avec l’accord des parties
– L : livrer les documents et la synthèse
– E : évaluer la phase
– R : reprendre les points à traiter

Parmi les exemples de stratégie du changement en entreprise nous pouvons citer la Caisse d’Epargne Ile de France et son projet de dématérialisation. Dans le cadre de sa transformation digitale, la Caisse d’Épargne a lancé en 2008 un projet de dématérialisation conséquent s’étalant sur 10 ans. Afin de répondre au mieux aux besoins des agences, la Caisse d’Épargne a placé le collaborateur au centre de ses réflexions en n’imposant pas une solution ferme, mais en s’adaptant aux souhaits des collaborateurs. Cette démarche a permis d’adapter la solution aux différents besoins des agences et de constater une réelle amélioration du changement, confirmée par les utilisateurs.

Nous en conviendrons, appliqué à un projet de changement en entreprise la parabole de Platon résonne comme un très bon conseil – voire un point d’attention majeur. Ne pas considérer les réticences, ou les attentes, des destinataires du changement revient à imposer une transformation qui aura du mal à trouver des porte-paroles, et qui sera certainement un échec.

Cette co-construction du changement s’appuierait sur l’analyse des groupes sociaux, de leurs souhaits et craintes, afin d’améliorer leur quotidien ou d’en faire des promoteurs de la transformation de l’entreprise. Alors, pour vos futurs projets de transformation, prêt à co-construire le changement ?

Cet article a été publié dans notre initiative*magazine #13,
„Changer, le grand-écart“

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Références:

  1. La République, Livre VII, Platon
  2. Certification IMCM, ACMC (https://www.imcm.eu/)
  3. La conduite du changement selon Microsoft et la Caisse d’Epargne

 

Article élaboré à partir de l’article « Platon, un pionnier de la stratégie du changement » de Maxime Baduel, publié dans Le Cercle Les Echos.

Maxime Baduel

Maxime Baduel est co-titulaire de la Chaire RSE du Collège Polytechnique International (Liège).

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